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30.04.2017

Lettre ouverte à Jean Lassalle

Bonjour, cher Jean Lassalle,

Je vous écris cette lettre ouverte pour vous dire que vous vous trompez.

J’ai fait campagne autour de moi pour vous. J’ai subi des rires, à cause de votre style, de vos mots hors pistes. Mais j’ai aussi essuyé des contestations profondes, comme lorsque l’on m’a rétorqué que votre position concernant Bachar el-Assad était beaucoup trop molle, donc coupable. Pourtant, je ne regrette pas mon soutien pour votre candidature. Vous avez apporté du sens, là où il n’y avait plus que désespoir de trouver un représentant national qui ne soit pas un pantin de télévision.

Après quelques jours suivant le premier tour, vous avez enfin fait une déclaration concernant le vote du deuxième tour. Nous pouvons y lire : « Choisissons tranquillement notre camp sans insulter l’autre » et « je veux réconcilier notre peuple, je ne crois pas possible d’y parvenir en montrant du doigt près de 50% des Français. » En lisant vos mots, je me suis rappelé pourquoi j’ai soutenu votre candidature. Je pense comme vous que malgré ces multiples fractures dans notre France, nous pouvons retrouver le chemin de la réconciliation. Merci. Vous êtes fort estimable, vous êtes extraordinaire, vous faites honneur à la France, malgré tous les défauts dont vous êtes « accablé » (je vous cite encore).

Mais ce n’est plus vous dont il est question ! Je vous le dis sans détour : Vous vous trompez quand vous refusez d’utiliser le vote Macron pour faire barrage au FN.

Vous vous trompez, car on peut se réconcilier dans le désaccord. Depuis plusieurs mois, je redoute la possibilité que Marine Le Pen soit élue et j’ai fatigué mon épouse à le répéter devant tant d’amis et tant de membres de nos familles, à tant de dîners et autres rencontres. Est-ce pour autant que j’ai insulté ses électeurs ? Jamais. Vous me lisez bien : jamais. Pas de « fasciste ».

Je peux certes utiliser ce mot pour elle. Car, s’il vous plaît, Jean Lassalle, dites-moi ! Dites-moi quand Marine Le Pen a exprimé un regret d’avoir été en relation avec des nazis ou des néonazis ? Quand ? Apportez-moi une citation d’elle. Nous, citoyens français, sommes en droit d’attendre cette preuve, nous qui avons grandi dans le pays où a été proclamée la Déclaration des Droits de l’Homme et du Citoyen.

Citez-moi un regret de Marine Le Pen qui vous semble sincère. Vous qui n’avez pas peur de regarder le moindre être humain dans les yeux, je vous écoute. S’il vous plaît, une seule citation ! Une seule citation où elle regrette d’avoir été en bons termes avec des personnes qui ne voient pas le racisme comme un problème fondamental empêchant de vivre ensemble. Ce sont des personnes qui pensent que c’est naturel d’être raciste, que cela structure les relations entre les humains. Ils sont malheureux, ils sont dangereux. « Regardez-les dans les yeux » eux aussi, quand bien même ils se cachent, ces quelques êtres à la conscience égarée, derrière la dédiabolisation du FN. (Relisez-moi bien, et constatez que même eux, je ne les insulte pas.)

Des profondeurs, je crie : Quand madame Le Pen a-t-elle exprimé un regret ? Je ne parle pas de phrase compliquée, une de ces phrases que j’ai déjà entendues, où par des formules tordues, elle condamne tout en justifiant des phrases de Jean-Marie Le Pen pour lequel la Justice l’a condamné.

Alors oui, le « monde de la finance » nous a escroqué avec l’élection de Hollande et s’apprête à nous refaire le coup avec Macron. Mais enfin, au moins cette fois-ci nous n’allons pas aux législatives avec un bandeau sur les yeux ! La campagne des législatives, voilà le réel enjeu de 2017.  

Ne mettez pas ce bandeau aux yeux de quelques Français qui vous font confiance sans trop savoir jusqu’où le FN peut aller. Je suis historien de formation. Il y a tant de choses que je ne sais pas, je le reconnais volontiers. Mais j’ai trop étudié les sociétés humaines passées et présentes pour savoir comment des mensonges peuvent fonctionner pendant des campagnes électorales. Je souffre dans ces moments où tellement de sentiments contrariés écrasent des réflexions profondes et utiles à long terme.  

Cher Jean Lassalle, je vous supplie. Pardonnez mon orgueil. Moi le banlieusard, je veux faire changer de conviction un berger des montagnes ! Je veux changer sa trajectoire, inconscient que je suis. Je vous supplie. Revoyez votre position sur les enjeux du deuxième tour de l’élection présidentielle.

Ainsi, permettez-moi de traduire des mots que vous avez fait résonner en hauts lieux : « s’il chante, qu’il chante, ce n’est pas pour moi » Je chante pour notre France… qui est loin de nous, et qui dimanche prochain, pourrait être plus loin encore.

Bien à vous, cher Jean,

Guillaume Desrosiers